| ||||||||||||
J’ai rencontré Francine Lancelot en 1980 sur les conseils de Catherine Perrier. C’était au cours d’un stage organisé à Ti Kendach’ en Bretagne autour des collectes de danse effectuées par Francine dans l’Ouest. J’avais pu me libérer pour y venir passer une journée et présenter les premiers balbutiements de la reconstruction des pas d’été du sud-Sarthe. Francine m’accueillit très chaleureusement et me fit lire, par petits bouts et dans le désordre, une bonne partie de sa thèse avec un enthousiasme communicatif.
Plus tard elle nous a invité, Catherine Thuard et moi-même, rue Portefoin pour nous montrer les films qu’elle avait réalisés, avec Jean-Marie Lancelot, au cours de leurs enquêtes sur les Sociétés de Farandoles dans le Gard. À cette occasion, nous lui avons demandé conseil au sujet des pas d’été que nous étions en train de reconstruire. Compte tenu de sa connaissance des danses de caractères dans le Sud-Est et de la danse baroque, nos hypothèses de reconstruction lui ont semblé tout à fait vraisemblables. Elle nous a aidé à reconstruire le “jeté battu“ du 15e pas d’été et à mieux comprendre les indications de nos informateurs à son sujet.
Plus tard, en 1988, elle a accepté d’être l’un des deux rapporteurs de mon diplôme de l’E.H.E.S.S. sur les cahiers de danse du sud-Sarthe, m’encourageant alors à me former en cinétographie Laban.
Pendant trois étés, nous avons suivi les stages qu’elle animait, avec ses élèves, à Sablé. Nous cherchions à y découvrir quel type de filiation avait pu exister entre la “Belle Danse“ du XVIIIe siècle, le Quadrille du Premier Empire et les danses de caractères du XIXe siècle. Bien que cette filiation ne soit devenue claire que tout récemment grâce à la rencontre autour d’Arlequin à Nantes, ces stages nous ont permis néanmoins d’approcher un des aspects de la danse baroque “de l’intérieur“, de suivre les cours passionnants de Francine sur l’écriture Feuillet et d’assister à de nombreux spectacles de grande qualité.
Dans le cadre de ma thèse, Francine m’a ouvert tous ses dossiers d’enquêtes avec une grande générosité. Elle les a ressorti de ses cartons afin de me les prêter pour copie. De même elle m’a permis de recopier tous ses films “gardois“.
En 1995, la date de ma soutenance de thèse ayant été reportée plusieurs fois, je n’ai pas eu le plaisir de la compter dans mon jury, car elle était partie faire de la randonnée au Sahara !
J’ai essayé, en vain, de faire publier sa thèse, persuadé que c’était un travail de grande valeur qui ne devait pas rester confidentiel. Aucun éditeur n’ayant voulu prendre ce risque, je lui ai proposé bien modestement, qu’à défaut de mieux, ce soit l’aRès qui la publie. Après un temps d’hésitation, elle a finalement accepté, ce qui nous a donné le plaisir de nouvelles rencontres. Lors de ces contacts, j’ai toujours été frappé du contraste qui existait entre son statut reconnu de “grande dame de la danse“ et la simplicité chaleureuse d’une amie.
Cela m’a tout particulièrement marqué le jour où nous sommes passés chez elle avant d’aller voir la reprise d’Atys, merveilleux opéra où elle exprimait la plénitude de son talent de chorégraphe. Après avoir déposé ses documents d’enquête “en régions“, elle a été très touchée de savoir que Magali Viale avait réalisé un mémoire de maîtrise à partir du corpus de brevets de danse de son fonds d’Aix en Provence.
En 2002, voyant sa santé décliner, elle a décidé d’organiser chez elle une rencontre conviviale de tous ses amis danseurs ou chercheurs en danse. Son souhait était de mettre en contact tous ces gens qui lui étaient chers, afin que la dynamique de son œuvre lui survive. Ce fut une soirée mémorable où l’on a vu tour à tour Carles Mas exécuter des pas de danse italienne ancienne, puis Wilfrid Piolet nous montrer la forme archaïque des pas de danse appris, lorsqu’elle était élève à l’Opéra de Paris. Christine Bayle a également exprimé son vécu intérieur de danseuse baroque, pendant que Nathalie Van Parys présentait les versions retravaillées de certains des pas de danse baroque reconstruits par Francine. Et la soirée s’est terminée en dansant des ronds chantés, sous la houlette de Catherine Perrier...
Deux ans plus tard, Francine a souhaité que nous refaisions le fête chez elle, en son honneur. Malheureusement elle n’était plus là.
Ces soirées ont, entre autres, abouti aux deux journées d’Atelier-Rencontre autour d’Arlequin, organisées par Jean-Noël Laurenti à Nantes. Cette manifestation fut l’occasion de communications érudites, mais aussi d’une pratique joyeuse et chaleureuse de la danse. Francine était vraiment parmi nous...
“La Danse à la fête votive du Caylar“ in Arts et Traditions Populaires, janvier-mars 1968, pp. 63 à 66.
“Écriture de la danse le système Feuillet“ in Ethnologie Française n° 1, Maisonneuve et Larose, Paris, 1971, pp. 29 à 50.
Les Sociétés de farandole en Provence et Languedoc, thèse de 3ème cycle E.P.H.E., Paris, 1973, publié par A.R.È.S., Le Mans, 2000.
“Bourrées à deux, en Aubrac, selon deux systèmes d’écriture“, in L’Aubrac, T. V, C.N.R.S., Paris, 1975, pp. 347 à 359.
Pochette du disque Les Caractères de la danse, Stil discothèque, Paris, 1981.
“Farandole populaire et farandole savante en Provence et Languedoc“, in La Recherche en Danse N° 1, Paris, 1982, pp. 75 à 81.
“Les Ornements dans la danse baroque“ in Les Goûts-réunis, Besançon, 1982, pp. 72 à 78.
“L’Écriture Feuillet. Regards sur terminologie et typologie“ in La Recherche en Danse N° 4, Paris, 1985, pp. 19 à 28.
“Remarques sur les contretemps“, in Les Contredanses du Journal Musical Liégeois “L’Echo“, Vol I, de J.-P. Van Aelbrouck, C.R.B.F. , Bruxelles, 1986, pp. XXI à XXIII.
Gavotte de Vestris, Gavotte provençale ? Lyon 1992, publié par A.R.È.S., Le Mans, 2000.
La Belle Danse, catalogue raisonné fait en l’An 1995 sous la direction de Francine Lancelot, Van Dieren Éditeur, Paris, 1996. | ||||||||||||